C’est l´histoire presque banale de l´extinction d´un peuple. Après la mort d´Ursula et Cristina, les deux abuelas indigènes de l´ile chilienne Navarino, l´éthnie Yaghan aura disparu. Victime de l´esprit colonisateur de l´homme blanc.
Au milieu du siècle dernier, environ trois mille Yaghan habitaient les extrêmes confins de la Terre de Feu, entre le canal de Beagle et le cap Horn. Le contact avec les Européens, baleiniers, missionnaires, éleveurs, aventuriers, navigateurs et parfois naufragés, leur sera fatal. Vivant nus dans des huttes sommaires ou dans leurs canots d’écorce, les Fuégiens seront décimés par la phtisie et la tuberculose, chassés comme des bêtes nuisibles. On ne compte plus que trois cents Yaghan en 1891 et, en 1994, seulement trois ou quatre.
Les Yaghans (ou Yamanas) peuplaient la Terre de Feu avant sa colonisation. Magellan les repéra lors de son expédition, mais les premiers contacts prolongés entre Yaghans et colons eurent lieu au milieu du 19ème siècle. L´évangélisation des terres impies et les missions scientifiques conduisirent les Blancs à la rencontre des peuples primitifs. Où l´on retrouve Darwin, bien sûr, mais aussi la Première Année Polaire Internationale de 1882 et enfin l´Autrichien Martin Gusinde, auteur d´une somme sur les Yaghans.
Ainsi commença la lente agonie des Yaghans, réplique malsaine de l´histoire de la plupart des peuples colonisés. Les chiffres sont sans appel : en 1848, on évaluait la population de l´île á 3000 personnes, à 1300 en 1880 tandis que seules 8 personnes de mère et père yaghans étaient encore vivants en 1972.
Ursula et Cristina
sont encore aujourd’hui les héritières du savoir oral des Yaghans, ce peuple de pêcheurs qui s´aventurait en canoé le long des détroits de Terre de Feu.
Elles racontent que leurs ancêtres, habitués à vivre totalement nus même par un climat si froid, furent forcés de porter des vêtements par les colons choqués par la nudité du peuple soumis. Des vêtements qui, selon la légende, apportèrent la maladie et la mort.
Chroniques d’Amérique Latine, n°2
tiré du site internet http://www.vialibre5.com/pages/page_chronamlat_2.htm
par Raphaële Bail (reporter)
et Sébastien Bonnefoy (photographe, sauf mention)
et Sébastien Bonnefoy (photographe, sauf mention)