Entre 1000 et 2000 cyclonudistes à Philadelphie

“L’Amérique puritaine”, c’est un cliché.
Comme tout cliché, il est à la fois vrai et faux. Vrai parce qu’il y a un fond de vérité, sans vouloir insulter les Ecossais, s’ils ont la réputation d’être radins, il y a peut-être une raison, sans vouloir accuser les marseillais, s’ils ont la réputation d’être vantards, il n’y a peut-être pas que du faux etc.

MAIS l’Amérique, c’est très vaste, c’est trois fuseaux horaires, avec des populations, des modes de vie, des mentalités, fort différentes d’un coin à un autre.
Dans certains Etats, les homosexuels doivent se cacher sinon ils perdent leur boulot, ne trouvent pas d’emploi etc.
D’autres Etats en revanche ont accordé aux homosexuels le droit de se marier.
Certains Etats sont très très conservateurs sur le plan des moeurs (dans certaines universités par exemple, les assurances médicales pour les étudiants ne remboursent pas les contraceptifs; ne parlons pas de l’avortement!), d’autres sont très libéraux.

Alors, dire “l’Amérique”, mettre le Maine ou l’Oregon dans le même sac que le Kansas ou le Dakota du Sud, c’est comme dire “l’Europe” et mettre la Pologne dans le même sac que les Pays-Bas.

On voit ici la cyclonue de Philadelphie.
Philadelphie est une ville ou Obama a dû avoir 80% des voix. Mais à deux heures de route à l’ouest de Philadelphie, c’est Mc Cain qui a eu 80%.
Idem, la Californie du nord est très gauche républicaine, et en ce qui nous concerne, très libérale vis-à-vis de la nudité. (On peut notamment se bronzer nu dans les parcs publics). Chose impensable dans le même Etat mais dans le sud, vers San Diego par exemple.
En fait, ça varie non seulement d’Etat à Etat (les lois, la justice, ne sont pas du ressort fédéral, mais de chaque Etat, chacun ayant ses propres lois pénales), mais même au niveau du comté (county, l’équivalent en gros de nos départements français).

Globalement, les Etats-Unis sont plus pudibonds que la France, mais il faut vraiment dire globalement. Dans le détail, c’est beaucoup moins évident.
N’oublions pas la pudibonderie française, un homme poursuivi (même s’il a été relaxé) pour avoir été nu dans sa salle de bain en présence de sa fille de 16 ans, un homme poursuivi (non lieu, mais il avait été placé en garde-à-vue) parce qu’on l’a aperçu nu à travers une vitre en verre dépoli.

Les rapports hommes-femmes aux Etats-Unis sont beaucoup plus rigides qu’en France (prendre un café avec un ou une collègue est quasiment assimilé à une avance), mais aux Etats-Unis, le sauna, si c’est séparé H/F, c’est en revanche toujours nu, et dans les vestiaires, dans les piscines, les gens se douchent nus. Ma femme m’a dit qu’elle n’avait jamais vu quelqu’un se doucher habillé avant de plonger dans le bassin.

Donc, (comme souvent), pas si simple!

J’ajouterai pour finir que la France va dans un sens, rétrograde, quand en ce moment l’Amérique va dans l’autre, progressiste.
Sur certains sujets, nous sommes très en avance sur eux (homosexualité, liberté dans le couple, la famille: aux Etats-Unis, il est à peu près inconcevable d’avoir des enfants sans être marié; contraception, avortement), mais sur d’autres, ils sont beaucoup plus ouverts que nous.
En France, si une mère allaite au-delà d’un an, les gens trouvent ça bizarre. Aux Etats-Unis, il n’est pas rare de voir des enfants de 3 ans téter.
En France, à l’école, dans l’éducation des enfants, dans les loisirs mêmes, il y a vraiment un moule dans lequel il faut rentrer, ou alors il faut accepter sa marginalité.
Aux Etats-Unis, les méthodes d’éducation varient énormément selon les origines et selon les familles, et c’est “chacun fait comme il le sent, du moment qu’il s’occupe bien de ses enfants”.

Je vois ça parce que ma femme est américaine et que nous fréquentons beaucoup les Américains de Paris, qui tous nous disent “c’est fou ce que l’école française est rigide. C’est fou ce qu’à la crèche ils sont rigides. C’est fou ce qu’au club de tennis ils sont rigides”.

Une des raisons pour lesquelles l’intégration en France fonctionne si mal (n’idéalisons-pas non plus les Etats-Unis, rappelons-nous les émeutes de Los Angelès, c’était il y a tout juste 20 ans), c’est que les Français confondent intégration et assimilation, on ne peut être intégré que si l’on est comme les autres.
Aux Etats-Unis, parfois plus d’un siècle après les gens conservent leurs particularismes (les Italiens sont toujours là comme communauté quand en France ce n’est plus qu’une origine etc.), mais du moment qu’on partage les valeurs fondamentales, chacun a le droit d’être différent.

Un jour si j’ai le temps, je ferai de la sociologie comparée et de l’étude des mentalités comparée, comme on fait de la littérature comparée ou du droit comparé.
Vaste programme!