26 avril 2024
Résumé de la démons...
 

Résumé de la démonstration d'irwin sur l'exhibition sexuelle

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fp-nadr
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Interprétation stricte ne signifie pas "à la lettre" sinon ce serait trop contraignant !
Et l'interprétation stricte n'empêche pas le juge de définir les termes non définis par la loi elle-même !

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PhilE
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Fort bien Gilles, mais comme je le disais plus haut, le juge est à la fois joueur sur le terrain et arbitre, et plus encore, celui qui définit les règles du jeu, et les définit au cours même du jeu (un peu comme ces enfants qui jouent aux dames et lorsqu'ils réalisent qu'ils ont moins de pions, déclarent "on joue à qui perd gagne").

Alors, la morale, c'est lui qui la définit. Si le juge estime que la nudité n'est pas de l'exhibition sexuelle, la relaxe est possible, s'il estime le contraire, c'est la condamnation.

Personne n'a à discuter de savoir si voler une voiture est un vol, si fracturer une porte et voler la télé est un cambriolage; la seule variation d'un juge à un autre sera le quantum de la peine.

Pour la nudité, ça renvoie à la morale, et oui, Gilles, tout à fait d'accord, la morale, elle varie d'un lieu à un autre, d'un pays à un autre, d'une époque à une autre, et d'un individu à un autre.
En l'occurrence, il faut s'en remettre à la morale du juge.

Faire appel? On se retrouve dans la même cas de figure: sur quel juge d'appel on tombe, quelle est sa position vis-à-vis de la nudité.

Cassation? Jusqu'ici, en la matière, la Cour de Cassation a toujours suivi les tribunaux, se fiant au pouvoir d'appréciation des juges.

Cour Européenne de Justice? Il faut d'abord épuiser les voies de recours nationales; et là encore, il n'y a pas de droit européen de la nudité, et l'on sait que la morale est très variable d'un pays à un autre. Jusqu'ici, l'avortement est interdit en Irlande, à Malte, il est en pratique interdit en Pologne: aucun recours européen n'a pu s'y opposer. De même, (et ce n'est pas faute d'avoir essayé), les anti-avortement n'ont jamais réussi à obtenir la nullité de lois nationales ou de jugements nationaux autorisant l'avortement.
Idem pour le divorce, interdit à Malte et en Irlande.

Invoquer l'Espagne, l'Allemagne, l'Angleterre? Eh bien, il y a fort à parier que le juge répondra "allez donc passer vos vacances là-bas ou allez vous y installer".
(C'est ce que m'avaient répondu des policiers).
Ou vous répondra (probabilité aussi forte), l'Espagne c'est l'Espagne, mais la France c'est la France.

Eh oui, vérité en-deça des Pyrénées, erreur au-delà!

La loi est floue, ambigüe, je crois que nous sommes tous d'accord là-dessus. C'est ça notre problème. Car si le législateur avait simplement voulu dire "la nudité publique est interdite", il n'aurait pas prévu un an et 15 000 EUR, il aurait par exemple prévu 250 FS (160EUR) comme dans le canton suisse de Rhodes-Intérieures, ou 38EUR comme à Paris-Plage.
On a un seul et même article qui peut servir à relaxer ou condamner un simple nudiste, et ce même article qui sert aussi à poursuivre celui qui va se masturber dans l'ascenseur avec une fillette de 6 ans.

Alors, que faire si un randonnueur est pris et se retrouve au tribunal? A mon avis, s'en tenir au "ça n'a rien d'une exhibition, ça n'a rien de sexuel", et Inch'Allah.
Si le juge parle de morale, dire que la morale n'a absolument rien d'un absolu, la moralité de l'un pouvant être l'immoralité de l'autre. Mais là encore, le problème est que le juge, avec l'éducation qu'il a reçue, son caractère personnel, dira ce qu'est la morale, comme si c'était LA morale.
La base juridique me semble trop fragile pour contester un juge sur ce terrain. Tout
au plus pourra-t-on contester les réquisitions du procureur ou les plaintes des parties civiles éventuelles, mais contester le juge, difficile car c'est lui-même s'il décide s'il a raison.
Un peu comme si un candidat à la présidentielle lors du débat jugeait lui-même si son argumentation est bonne ou non.

En revanche, parler de la randonnue, la faire connaître comme vient de le faire l'Apnel dans le dernier numéro de la revue de voyage Ulysse, oui, ça contribue fortement à faire admettre que la nudité n'est pas forcément une exhibition sexuelle.

Je viens de lire cet article cet après-midi, et il est remarquable pour la défense du nudisme.
En plus, l'annonce de l'article est sur la couverture du magazine, et l'article est illustré de photos. Si on tombe sur la revue, on ne peut passer à côté.

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Vente de videos vivrenu-tv, WNBR randonues

gilles
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Premier message du sujet
(@gilles)
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Sur le forum http://www.apnel.fr/forum/viewtopic.php?pid=427#p427 thierry a developpé un texte très interessant.

Ce texte bien que long est captivant, donc à lire jusqu'au bout.

Archive du texte :

Chers tous,

J'ai récemment commis ce texte. Ces premiers lecteurs m'ont encouragé à vous le donner en pâture. Il n'a pas tout-à-fait le format message (un peu long). Je m'en excuse. J'espére tout de même qu'il vous intéressera. Vos réactions sont attendues avec intérêt et crainte. Thierry
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Naturisme, nudité, libertés publiques et répression

Lorsqu’on parcourt la littérature électronique relative au droit et au naturisme, on ne peut qu’être étonné, et affligé, de constater que l’essentiel des discussions et informations, tourne autour de l’article 222-32 du Code Pénal, relatif à la répression de « l’agression à caractère sexuel » que constitue «l’exhibition sexuelle », et de son interprétation. C’est bien compréhensible puisque c’est à travers lui que la pratique du naturisme est parfois menacée, mais c’est également navrant, incroyablement blessant et totalement inepte.

En effet, est-ce là que devrait se situer le débat juridique ? Où se placent « naturellement » le naturisme et la nudité dans le champ du droit ?

Comme chaque fois qu’on examine le droit relatif à un comportement humain, on peut se placer du point de vue de ce qui est possible, ou de ce qui est interdit. Mais par où doit-on commencer ? La réponse se trouve dans le plus vénérable des textes applicables en France : « La déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 », articles 4 et 5 :

« La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société, la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi. » Et puis : « La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas. »

On voit bien que, dans l’ordre d’importance, la liberté vient en premier, l’interdiction en second, et non le contraire. Les juristes appellent « libertés publiques » la matière qui étudie la traduction dans la loi des droits fondamentaux et, bien sûr, « droit pénal » la loi répressive.

Logiquement, il s’agit donc de se demander d’abord si les « libertés publiques » accordent au citoyen un « droit à la nudité », puis de vérifier quelles bornes éventuelles la « Loi » et, in fine, la loi répressive, a pu mettre à l’exercice de ce droit, par exemple, au moyen de ce malencontreux 222-32 C. Pén.

Droits de l’homme et libertés publiques

Le droit français énonce-t-il, ou contient-il, un droit à la nudité ?

Il fait à la fois moins et mieux que ça. Il affirme, comme on vient de le voir, les principes suivants :
• Tout ce qui ne nuit pas à autrui ne peut pas être interdit ;
• Seule la Loi peut limiter la liberté ;
• La Loi doit se contenter d’interdire ce qui est nuisible à la Société ;
• Tout ce qui n’est pas interdit est autorisé ;
• Tout ce qui n’est pas obligatoire est facultatif.

La pêche aux preuves

Le principe fondamental de la matière est donc : « Tout est autorisé, sauf ce qui ne l’est pas.» Il s’ensuit qu’il n’est pas possible, et c’est tant mieux, parce que ça évolue en permanence, de lister exhaustivement les droits contenus dans l’idée générale de « droits de l’homme ». Pour vérifier l’existence d’un droit à la nudité, il convient donc d’enquêter, d’aller à la pêche aux preuves : d’abord, aux preuves directes, ensuite aux preuves indirectes. Les preuves directes consistent en la recherche de l’affirmation positive d’une liberté publique dans un texte de loi. Par exemple, le « droit de grève », qui est une liberté publique, est affirmé positivement dans le préambule de la Constitution de 1946, toujours en vigueur. Les preuves indirectes consistent à rechercher, dans le droit au sens large, voire dans les us et coutumes de l’époque concernée, tous les indices de l’existence d’un tel droit. Cette méthode est souvent la seule pour les droits naissants car il est commun que l’affirmation positive d’un droit nouveau, que les citoyens doivent habituellement obtenir en se remuant, vienne après que son existence soit avérée dans les faits. De fait, les libertés publiques dans le droit, c’est comme les locutions nouvelles dans le dictionnaire de l’Académie, quand ils y entrent, il y a lurette que les citoyens s’en servent !

Les preuves directes

D’abord, une subtilité genre « poupées russes ». Les droits, ça peut s’emboîter les uns dans les autres. Par exemple, la « liberté d’aller et venir » implique le droit de se faire délivrer un passeport. Autrement dit, un droit peut être implicite et « en cacher un autre ». Ca n’est donc pas parce qu’il n’existe pas d’affirmation spécifique d’un droit à la nudité dans le genre « Tout individu à le droit de vivre nu » qu’il n’existe pas une affirmation positive de cette liberté, sous la forme d’un droit contenu dans un autre droit, lui-même affirmé positivement. Par exemple « le droit à l’image », qui permet d’interdire qu’on utilise celle-ci à notre insu ne contient-il pas, de prime abord, celui de donner de soi l’image que l’on veut ?

Autre subtilité : les droits, ça peut faire des petits. Par exemple : Le droit de « disposer de son corps » et la liberté « d’aller et venir », ne peuvent-elles pas se combiner pour confirmer un droit à aller et venir nu ? Le droit de disposer de son corps s’est développé autour de questions autrement plus importantes que d’innocentes randonnées naturistes, comme le droit de changer de sexe, de choisir sa mort, etc. Pour autant, sur le mode « Qui peut le plus, peut le moins », ne sera-t-il pas possible de démontrer que ne pas l’habiller est une façon de disposer de son corps d’autant plus légitime que le droit autorise déjà de faire de son corps à peu près ce que l’on veut, et qu’aller s’ainsi promenu-er, procède de la liberté de déplacement ?
Je n’ai pas de réponse à ces questions. Elle a n’ont que vocation à faire s’interroger sur une méthodologie de recherche d’un droit implicite. De fait, le droit à l’image fait l’objet de diverses lois mais est coi sur le droit à l’apparence ; le droit de disposer de son corps est également introduit dans la législation, mais pas dans le domaine de la couture.  Mes exemples sont donc un peu tirés par les cheveux. Ca n’est pas une raison pour ne pas explorer systématiquement toutes les pistes de cet acabit.

Les preuves indirectes

Intéressons-nous aux preuves indirectes que nous allons trouver, non plus dans les textes fondateurs, mais, par exemple, dans le « droit de tous les jours », en recherchant s’il est des situations où le droit d’être nu, dans la sphère publique, est expressément reconnu et comment ce droit fonctionne. Par exemple, les plages : Nous savons que les maires ont la possibilité (en tous cas, ils s’arrogent le droit et personne ne le leur conteste) d’interdire ou d’autoriser le naturisme sur tout ou partie du territoire de leur commune, dans le cadre de ce que l’on appelle leurs « pouvoirs de police ». Nous savons aussi que certains préfèrent ne rien faire du tout, et laisser s’installer des « tolérances », voire édicter des arrêtés de tolérance (sic).

On notera une bizarrerie. Si le naturisme était autorisé en principe, il suffirait de l’interdire là où on le souhaite. S’il était interdit en principe, il suffirait de l’autoriser par exception, ou de ne rien faire, si on est du genre « pas de ça chez moi ». Or, on fait les deux. Quant à la « tolérance », elle est bien créatrice de droits, surtout quand elle est officialisée par un arrêté municipal !

Peut-on tirer une conclusion de cette curieuse constatation ? Peut-être. Rappelons-nous que le principe fondamental, est que tout ce qui n’est pas interdit est autorisé (« Tout ce qui n’est pas défendu par la Loi ne peut être empêché » ont gravé nos Pères.) La délimitation d’une zone d’interdiction ne se justifie donc que par la zone de liberté qu’elle crée, ou confirme, à l’extérieur de cette zone, tandis que la délimitation d’une zone d’autorisation ne s’explique que par une interdiction généralisée.

En d’autres termes, autoriser par exception ce qui est interdit, c’est créer un droit, interdire par exception ce qui est autorisé, c’est le limiter, mais autoriser par exception ce qui n’est pas interdit, ou interdire par exception ce qui n’est pas autorisé, ce sont des pléonasmes. Dans le cas qui nous occupe, il y a de quoi s’arracher les cheveux en contemplant la diversité des situations, mais ce désordre plaide en pratique en faveur de la reconnaissance d’un droit sous-jacent car cela démontre l’impossibilité de se repérer précisément dans le maquis or, comme on l’a dit, la présomption, c’est la liberté.

Amusons-nous à penser aux endroits publics où la nudité se pratique sans que personne ne s’en offusque (gymnases, théâtres,…), dans le flou juridique. On me dira que ce n’est pas la même chose mais si, justement. Dans ces endroits, la nudité est tout bonnement autorisée parce qu’elle n’est pas spécifiquement interdite. Si elle était autorisée par exception à une interdiction explicite, il faudrait une dérogation explicite.

Et puis, cette nudité est tout bonnement admise par les citoyens. Il s’agit-là d’une considération essentielle : nous, citoyens, sommes, de fait, autorisés à nous accorder des droits les uns aux autres. Quand, le vent ayant tourné, ce qui était inadmissible au plus grand nombre est devenu majoritairement accepté, si la loi continue de le réprimer, elle devient elle-même hors-la-loi. C’est la loi !

Par exemple, mon voisin, qui m’a aperçu nu(e) dans mon jardin, et qui s’en fiche, m’accorde, de fait, en ne se plaignant pas, licence. C’est ainsi qu’avec la même loi écrite, il est possible de traîner, ou non, Charles Baudelaire devant les tribunaux pour pornographie, pour avoir écrit : « La très chère était nue et, connaissant mon cœur// Elle n’avait gardé que ses bijoux sonores. » (Les fleurs du mal). Les temps changent.

Puisque nous devons faire en sorte que nos libertés individuelles ne marchent pas sur les plates-bandes de nos voisins, c’est que, si le voisin n’a pas d’objection, il n’y a pas offense. La compilation des cas d’approbation ou de non objection expresse ou tacite de la nudité constitue donc un élément essentiel de la plaidoirie en faveur de la reconnaissance explicite de ce droit, et ce du point de vue juridique autant que d’un point de vue médiatique, car ces faits sont, en réalité, créateurs de droits.

Il serait également intéressant de regarder de près l’application du droit de manifester à la nudité. Manifester est un droit. Il est encadré par l’obligation de déclarer les manifestations en préfecture (pas d’en demander l’autorisation). Une manifestation de soutien qui prendrait la forme d’une randonnée naturiste et qui serait déclarée en préfecture ferait-elle nécessairement l’objet d’une interdiction ? Et si oui, cette décision, dont les motifs sont strictement contrôlés par les tribunaux administratifs, ne serait-elle pas attaquable, pourvu que les organisateurs aient choisi astucieusement les circonstances de leur manifestation ? Et si non, ne confirmerait-elle pas l’existence d’un droit ?

Je pourrais continuer longtemps, mais pas sans vous ennuyer, à essayer d’illustrer l’idée que le droit d’être nu existe déjà, en pratique dans certaines circonstances et en germe dans beaucoup d’autres, contenu dans l’ensemble des libertés publiques déjà positivement énoncées ainsi que dans les méandres du droit, des coutumes et des comportements dans lesquels nous baignons, et dont le flou est, en lui-même, créateur de droits. Cet épluchage est néanmoins un travail qu’il faudrait réaliser systématiquement.

Cela ne démentirait pas la justesse de la démarche visant à voir le droit à la nudité affirmé positivement, en toutes lettres. Sagesse populaire : « Ca va sans dire, mais ça va mieux en le disant. »
Pour s’amuser. Rappelons-nous la déclaration de 1789 : « Nul ne peut être contraint à faire ce que [la loi] n’ordonne pas ». Qui montrera la loi française qui dit : « Le port de vêtements est obligatoire » ?
Répression

Mais alors, où est le problème ? Du côté de la répression, bien sûr. Parce que le droit à la nudité existe peut-être en germe, mais pas clairement, en pratique. La faute au 222-32 C. Pén.

Les naturistes ne portent pas de jarretelles

A cause de lui, le débat juridique sur le naturisme est concentré, non sur les libertés mais sur ce qui distingue un naturiste d’un pervers, ce qui, comme nous le savons, est complètement à côté de la plaque. La lecture de la jurisprudence du 222-32 est édifiante (Sur www.legifrance.fr par exemple). Attention aux âmes sensibles, l’essentiel porte sur des comportements entre limite-limite et franchement répugnants : l’article 222-32 sert bien sûr avant tout à réprimer les amoureux extraordinairement distraits, les clients de l’amour tarifé pas regardants sur les conditions de travail de leur prestataire, bien sûr : les exhibitionnistes « chapeau mou et porte-jarretelles » et, on peut hélas l’imaginer en lisant les décisions, des cas peut-être plus graves où l’on a manqué de preuves.

Pour comprendre comment on a pu en arriver là, il faut s’intéresser au mode de fonctionnement du droit pénal. C’est une mécanique intellectuelle assez bien huilée, qui fonctionne sans grands changements depuis le procès de Jeanne d’Arc, et même avant.

Droit Pénal - mode d’emploi

D’abord, il faut constater des faits susceptibles d’être répréhensibles. C’est le boulot des forces de l’ordre. Ensuite, il faut qu’un juge vérifie, en gros, trois choses :
• Que les faits constatés correspondent bien, pile poil, à l’interdiction édictée par la règle pénale. Le « pile poil » est très important. La définition doit être rédigée au scalpel pour qu’il n’y ait aucun doute dans l’esprit de personne sur ce qui est interdit (En l’occurrence, ça n’est pas très réussi mais, quand ça se produit, cela doit se retourner au profit des personnes incriminées) ;

•Que l’éventuel coupable, selon les incriminations :

     •A, soit agi intentionnellement (Attention : « intentionnellement » signifie « qui a fait volontairement ce qu’il a fait », et non qui avait, ou pas, l’intention de «mal agir» ; cet autre aspect de « l’intention » relève en droit du « mobile » et compte pour du beurre) ;

     •Soit, été négligent ou imprudent, s’il s’agit d’un délit que, comme celui qui nous occupe, l’on peut commettre par négligence ou imprudence ;

     •Qu’il avait bien toute sa tête.

Quand tout cela est fait, il n’y a plus qu’à attendre que l’avocat ait fini son baratin et à condamner.

Dissection du 222-32

Regardons maintenant de plus près le fameux article 222-32 C. Pén. : « L'exhibition sexuelle imposée à la vue d'autrui dans un lieu accessible aux regards du public est punie d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. » Quelles sont donc les conditions de l’infraction ? Il faut, et il suffit de, constater :

1. Une « exhibition » ;
2. Que l’exhibition avait un caractère « sexuel » ;
3. Qu’elle a été « imposée » ;
4. La présence d’au moins un « autrui », spectateur non consentant ;
5. Que, d’où la personne en infraction se trouvait, le « public » pouvait, ou aurait pu la voir.

Reprenons, pièce par pièce :

« Exhibition » : Si les mots ont un sens, ce terme devrait contenir l’idée de « montrer avec ostentation » :

« Dois-je pour défrayer la chronique des scandales // Battre le tambour avec mes parties génitales ?
Dois-je les arborer plus ostensiblement // Comme un enfant de cœur porte un saint sacrement ? »
G. Brassens, Trompettes de la renommée

Pourtant, dans la jurisprudence, la recherche effective de l’ostentation est absente. Il faudra y revenir.

« Sexuelle » : Titeuf a bien raison, malgré son jeune age. Le zizi peut être « sexuel », mais pas forcément. Il s’est déjà trouvé (ouf !) des magistrats, et un ministre (Mr Nallet), pour considérer que la nudité sans provocation ou lascivité n’avait pas une telle connotation.  Mais ça n’est pas l’avis de tous.

« Imposée » : Caractérise l’absence de choix du spectateur ; si ma/mon voisin(e) doit monter s’accrocher à sa parabole pour me voir nu(e) dans mon jardin, la condition ne sera pas remplie !

« Vue» : Vue = de ses yeux : Aucune qualification particulière. Pas de notion de fugacité, ni de distance, par exemple.

« Autrui » : absolument n’importe qui : pas de qualification concernant les éventuels liens entre «coupable » et « victime ». « Autrui » peut donc être un membre du « public » mais pas forcément. C’est volontaire, et peut s’avérer utile pour sanctionner certains comportements déviants de la sphère privée. Rappelons qu’il faut tout de même que « l’exhibition sexuelle » lui ait été imposée.

«Dans un lieu accessible au regard du public » : le lieu en question est celui où s’est commise l’infraction, c’est-à-dire celui ou se trouvait la personne en infraction. Le « public » c’est, comme disait Georges Marchais, « les gens ». A priori, n’importe qui, mais il se distingue de « l’autrui » du dessus car il n’est pas nécessaire qu’il y ait eu un public distinct mais seulement qu’il ait pu y en avoir un. Il n’est pas non plus nécessaire que ce public se trouve dans un lieu public.

Tout cela pesé au trébuchet pour éviter de laisser des infractions impunies. Cet article a en effet, au premier chef, une fonction de protection par la répression de comportements déviants et, comme on l’a vu, c’est à cela qu’il sert, presque exclusivement. Il ne faudrait pas qu’un malfaisant puisse échapper à son sort grâce à une rédaction bâclée de la loi.

Cherchez l’erreur

Pourquoi donc cet article cause-t-il tant de soucis aux naturistes ?

• Ils vont nus mais ne s’exhibent pas ;
• Ils sont bien plus pudiques que la moindre couverture de magazine et se font une règle de vie d’éviter les attitudes ambiguës ou lascives dans la pratique de leur activité préférée ;
•  Ils font de leur mieux pour ne pas s’imposer aux autres ;
• Ils n’apprécient guère les regards voyeurs et font ce qu’ils peuvent pour les éviter.
• S’ils aiment les lieux publics, leur préférence va aux grands espaces où il y a de la place pour tout le monde.

Les ennuis ont commencé lorsque l’administration de la justice, reprenant le nouveau texte des mains du Parlement en 1993, a repris, du même coup, la main sur son sens. Elle a rédigé une circulaire, qui commente toutes les nouveautés du Code Pénal réécrit à l’époque, dont le 222-32. Dans un exercice d’une subtilité toute répressive, le ministère a interprété le texte pour lui faire dire ce qu’il aurait pu ne pas vouloir dire :
Il n’y aurait, (c’est moi qui résume), pas de différence entre « nudité intégrale » et « exhibition sexuelle » sauf dans les lieux spécifiquement dédiés au naturisme. Très fin ! Dès que l’on fait cet amalgame, les naturistes « sauvages » sont dans de beaux draps, car le reste de l’article roule sur eux façon rouleau compresseur !

Cet article aurait pu fonctionner comme une reconnaissance explicite d’un droit à la nudité mais à été cantonné à une sorte de « domestication » de ce que, selon l’autorité en place, la Société était prête à accepter à l’époque : le naturisme, tant que vous voulez, dans les centres et dans les lieux publics spécifiquement autorisés (en gros, les plages naturistes). Déjà dit : la Société avance plus vite que le droit en matière de libertés publiques. Ce dernier semble donc s’être fixé, en 1993 (quinze ans déjà !) en dépassant la situation précédente (le vieil « attentat à la pudeur »), mais en retrait de ce que la société aurait pu accepter. En outre, cette position avait l’avantage de permettre l’essor ou la consolidation de l’activité économique naturiste ainsi encadrée, dont la France, les parlementaires des régions concernées le savent, bénéficie plus que marginalement, tout en ne laissant pas « l’anarchie » s’installer.
Les législateurs ont toujours eu, à la fois, une passion pour, et une angoisse irrationnelle de, tous les domaines touchant, d’après eux, aux « bonnes mœurs ». Dans mon plus jeune temps, l’indispensable Robert Badinter faisait s’esclaffer les amphis où j’usais mes jeans en racontant la frénésie législative des parlementaires, qui, aux XIX et XX siècles, légiférèrent à tort et à travers sur tous les sujets qu’ils percevaient comme « scabreux ». Même les députés qui connaissaient bien les « bonnes adresses » de la capitale.

Pour finir sur le sujet répressif, il faut se demander si, considérant que toute, ou presque, la jurisprudence se concentre sur de « vrais » cas d’exhibitionnisme sexuel, il n’est pas naturel que les juges aient eu peu de loisir et peu de désir de définir l’infraction restrictivement : les cas qu’on leur soumet n’y engagent pas, et si par conséquent, il n’est pas hasardeux d’utiliser leurs décisions sans pincettes juridiques pour imaginer ce qu’ils décideraient dans le cas du randonneur naturiste surpris. En particulier, cela explique sûrement en partie la difficulté qu’il y a à déterminer, dans la jurisprudence, l’interprétation large ou étroite des mots « exhibition sexuelle », puisqu’ils ne connaissent que de cas où il n’y a guère de doute.

Retour à la case départ

Il faut maintenant boucler la boucle et revenir à la croisée des libertés publiques et du droit pénal, pour vérifier si, oui ou non, la nudité est interdite en principe.

La victime du naturiste : une arlésienne

Ici, un point qui me paraît important. On trouve fréquemment une interprétation selon laquelle l’infraction est constituée, même en l’absence de témoin effectif, du moment qu’il y aurait pu y en avoir un. Cette idée naît évidemment de la formule « lieu accessible au regard du public » qui sous-entend que la présence effective d’un « public » n’est pas, en fait, nécessaire mais elle me paraît procéder d’une confusion entre « l’autrui » et le « public ». En effet, si l’infraction peut être constituée même avec un « public » potentiel, il n’en reste pas moins qu’il faut au moins un « autrui », une « victime ». Après tout, il s’agit d’une « agression », qui exige un « agressé ».

On pourrait, mais on aurait tort, rétorquer :

• en faisant appel à la notion de « tentative ». Certes, en droit pénal, la tentative est punissable comme le délit mais, raté, seulement si la loi le prévoit, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence ;

• Ou encore que le délit n’est pas un délit intentionnel, ce qui est exact. Cela signifie que le délit peut être constitué même par imprudence ou négligence. Soit. Mais, il me semble que cela ne retire rien à l’exigence d’une vraie « victime ».

Et s’il faut une victime, à quoi la reconnaît-on ? Rappelons-nous que nous nous trouvons dans le chapitre : «Atteintes à l’intégrité physique ou psychique de la personne». Il ne me paraît donc pas du tout échevelé de prétendre que pour que le témoin de la nudité en question devienne un « autrui », il faut encore démontrer cette « atteinte à l’intégrité psychique » (pour ce qui est de « physique », je ne vois vraiment pas !). Certes le texte de l’incrimination se suffit de la circonstance que « l’exhibition » ait été « imposée » mais en déduire que l’exigence tombe d’un dommage à la personne agressée ne va pas de soi.

Les autres incriminations du même chapitre qualifient précisément les atteintes à la personne susceptibles d’entrer dans leur qualification. Le 222-32 opère un peu comme une voiture balai des comportements indécents, pour lesquels il n’y aurait quasiment rien à prouver, juste que le vilain (ou la vilaine) était tout(e) nu(e). Pourtant, n’est-il pas parfaitement hypocrite, de nos jours, de prétendre que la simple vue d’une personne banalement nue puisse causer un dommage psychique quelconque à, par exemple, un témoin fugace des escapades des randonneurs naturistes ? Peut-on prétendre qu’un groupe de ces joyeux compères se baladant sans témoins, loin du monde et de sa rumeur est en situation d’exhibition sexuelle ? Qu’il fait preuve de négligence par définition et, s’il a été vu, qu’il en soit résulté la moindre atteinte à l’intégrité psychique du passant, même mécontent ? Si on postule que, imaginant que nos randonneurs naturistes finissent tout de même devant les tribunaux, les juges trouveraient difficile de considérer le délit comme constitué sans victime (témoin involontaire et non consentant), ou sans victime ayant subi une atteinte psychique, il faudrait considérer qu’ils n’étaient pas en situation illégale, à tout le moins jusqu’à cette rencontre, plus précisément jusqu’à preuve du dommage causé à la victime ?

Auquel cas, il existerait bien, en France un droit à la nudité dans les lieux ouverts au publics, mais très imparfait car, survienne « l’autrui » et nos amis randonneurs se trouveraient illico dans la plus totale insécurité juridique.

Retour à l’envoyeur

A la croisée de la répression et des libertés publiques, se trouve encore un autre sujet à mentionner brièvement. La protection du droit des naturistes à ne pas subir les « agressions sexuelles » des véritables exhibitionnistes. En interprétant le 222-32 comme elle le fait, l’administration rend très difficile l’incrimination d’un de ces malheureux débiles en milieu naturiste. Ceci est contraire au droit que tous les citoyens on d’être également protégés par la loi. On trouve en outre, en filigrane, dans cette négligence, une assimilation fort déplaisante entre naturisme et mœurs légères. C’est déplaisant pour les adultes, c’est irresponsable pour les enfants naturistes qui se trouvent privés de leurs droits.

Il faut donc se demander si, en se mettant dans cette situation, le droit français ne s’est pas mis en contradiction avec lui-même et si, en conséquence, il n’est pas des moyens pour qu’il accroisse la sécurité juridique des braves gens et qu’il cesse d’être en puissance de sanctionner ceux qui ne devraient pas l’être.

Comment s’en sortir

Une solution souvent avancée serait de modifier, soit l’article 222-32, soit son interprétation administrative et judiciaire pour en éradiquer l’équation « nudité hors lieux dédiés = exhibition sexuelle » et d’ajouter une condition explicite liée à l’attitude provocante ou lascive aux conditions de réalisation de l’infraction.
C’est alléchant et ça ne serait que justice mais il y a un « mais ». Il faut se poser la question des conséquences d’un tel changement. En effet, comme on l’a vu, le droit français ne régule le « droit à la nudité » que par cet article qui, hélas, n’est pas fait pour ça. Supprimez l’équation ci-dessus, d’un seul coup, sans rien faire d’autre, et tout quidam pourrait se promener tout nu dans les rues et, pour autant qu’il se tienne « convenablement », serait à l’abri de toute critique, voire de toute sanction. L’Autorité Publique se trouverait alors avec un double problème :

• Aurait-Elle toujours l’outil qu’il faut pour réprimer ce qui doit l’être ?
• Quid des droits des non naturistes ? Aurait-Elle mis en place une solution qui corresponde effectivement à l’état de la société, comme se doit de le faire un Etat démocratique ?

Il n’est jamais superflu de se poser la question du point de vue de l’autre.

• Aurait-on abîmé l’outil répressif ?

Pas impossible. A cause de l’introduction d’un paramètre subjectif dans les conditions d’une infraction, ce qui n’est jamais souhaitable. Or, « provocation » ou « lascivité », ou tout autre terme de la même eau, c’est quand même une affaire personnelle :

« Quand la sainte famille Machin croise sur son chemin deux de ces amoureux,
Elle leur décoche hardiment des propos venimeux… »
G. Brassens, Les bancs publics

Ne serait-il pas possible qu’une telle vision du texte profite à d’infréquentables personnages ? N’oublions pas que nous attendons de nos juges répressifs qu’ils ne condamnent qu’à coup sûr. En fait, c’est un péché capital en droit pénal que de mettre de la subjectivité dans les conditions de réalisation d’une infraction.

• Quid des droits des non naturistes ? Aurait-on mis en place une solution qui corresponde effectivement à l’état de la société ?

D’un seul coup, en théorie, les non naturistes devraient subir la présence de gens nus autour d’eux sans pouvoir s’en plaindre alors que ça les dérange. Revenons à notre chère déclaration de 1789 : « L’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société, la jouissance de ces mêmes droits. »

Laissons à d’autres le soin de rechercher s’il existe aujourd’hui un « droit de ne pas voir des gens nus si on n’en n’a pas envie » mais il paraît que ce droit est perçu par certains comme légitime, qu’ils le souhaitent pour eux-mêmes ou pour les autres. Même parmi les naturistes. Il s’ensuit que, même si le législateur voulait aller dans ce sens, il devrait le faire avec des pincettes pour objectiviser autant que possible les conditions de l’infraction et que, par ailleurs, il souhaiterait vraisemblablement assortir cette réforme d’autres innovations.

En fait, la gestion du « droit de la nudité » par la répression est une impasse. Pour progresser et conclure, il faut donc reprendre les choses par le bon bout. Le droit d’abord, ses limites ensuite. La société doit trouver le moyen d’affirmer, et il faut l’y aider, Le droit à la nudité. Comme on l’a vu, il est déjà en filigrane dans la loi, et dans la société, actuelles. Les naturistes ont tout intérêt à continuer le travail d’analyse de la situation juridique et sociétale pour constituer le faisceau d’indices qui démontre l’émergence d’un droit à la nudité. Paradoxalement, comme on l’a vu, y compris en utilisant les failles du 222-32 C. Pén.

Une fois la démarche engagée, il est inévitable que la société se préoccupe de définir les limitations qu’elle pensera devoir y mettre. On sait bien que chacun devra y mettre du sien mais, est-il besoin, au premier chef, du droit pénal pour mettre d’accord naturistes et non naturistes ? Bien sûr que non. La plupart des conflits d’intérêts entre titulaires de droits concurrents sont régis par des textes ou le droit pénal ne joue qu’un rôle marginal et mineur, pour sanctionner le non-respect vindicatif des règles de « bon voisinage » entre deux libertés :

• Ecolos/chasseurs ;
• Randonneurs / 4x4 ;
• Pêcheurs /plaisanciers ;
• Voyageurs / grévistes, etc.

Les naturistes ont-ils intérêt à se préoccuper d’aider à cette tâche de limitation de leurs propres droits en proposant, par exemple :

• d’exclure, ou de permettre d’exclure les zones du territoire où cette liberté ne pourrait pas s’exercer ? De laisser par principe au naturisme, les lieux de nature/de détente comme les plages et les grand espaces que nous aimons, mais pas le Champ de Mars ni le marché de Brive-la-Gaillarde dont nous n'avons que faire ?

• D’exiger une interruption de la nudité dans les cas de promiscuité mal vécue ? (comme, dans le temps, on refermait la fenêtre dans le train, même un jour de canicule, quand la mémé du coin se plaignait des courants d’air.)

• De sanctionner le franchissement des limites nouvelles par une autre infraction telle qu’une contravention (et non plus un délit) en cas de nudité dans un lieu interdit au naturisme (sans plus de référence au « sexuel »).

Il ne parait pas utile d’aller au devant des désirs des naturistophobes, ils sauront se faire entendre, mais mieux vaut être préparés à la négociation, et à la contre-proposition, car la conversation relative à la création d’un droit vient toujours celle qui concerne ses limitations et il n’y a pas d’avantage à laisser le champs libre aux esprits chagrins.

Le dernier mot à nos pères : la déclaration de 1789 . J’ai dit une bêtise ? Pas eux.

http://www.legifrance.gouv.fr/html/cons … onst01.htm

Merci d'avoir lu jusqu'au bout!

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